Sous les regards de leurs chefs d’Etat, les ministres congolais et burundais en charge de la Défense ont signé, ce lundi 28 août au Palais de la nation à Kinshasa, un protocole d’accord portant sur le renforcement des relations politiques et militaires entre la République démocratique du Congo et la République du Burundi.
Cette signature intervient au terme d’une visite de travail de deux jours, dans la capitale congolaise, du président Evariste Ndayishimiye, et ce à près de deux semaines de l’échéance du mandat de la Force régionale de la Communauté dAfrique de lEst (CAE) dont la présidence tournante est assurée par le Burundi.
Officiellement, selon le communiqué conjoint, l’objectif de cette visite a consisté à renforcer davantage les liens d’amitié, de fraternité et de coopération dans les domaines variés d’intérêt commun tels que ceux de la défense, de la sécurité et du commerce. Les deux chefs d’État ont aussi évoqué la situation sécuritaire dans l’Est de la RDC à travers les processus de Nairobi et de Luanda. « Ils ont constaté et déploré le fait que le M23 n’a pas la volonté de se désengager et d’aller dans le centre de cantonnement. A cet effet, les deux chefs d’État ont lancé un appel à la Région de prendre ses responsabilités pour contraindre le M23 d’aller au cantonnement. Ils ont également rappelé l’obligation faite au M23 et aux autres groupes armés locaux et étrangers dentamer sans délai le processus de démobilisation, désarmement et réinsertion dans la vie civile pour permettre didentifier et de contraindre les groupes armés étrangers récalcitrants, de les traquer et de les mettre à disposition de leurs pays dorigine ».
Connexion entre M23 et Twirwaneho
Au cœur de cette entente entre Bujumbura et Kinshsa, font savoir à INFOS.CD des sources diplomatiques, il y a l’ambition de gestion concertée, par les deux Etats, des menaces qui font simultanément peser sur les deux pays des groupes armés actifs dans l’Est du territoire congolais, particulièrement le Mouvement du 23 mars (M23) et le groupe armé Twirwaneho, dirigé par l’officier déserteur des FARDC, Michel Rukundo Makanika. Ce dernier groupe opère dans la province du Sud-Kivu en connexion avec des groupes armés burundais, notamment les Forces de libération (FNL).
Actifs sur les hauts plateaux de Mwenga-Fizi-Uvira à la lisière avec le territoire burundais, les FNL, connectées à des groupes armés locaux congolais, constituent une menace à la stabilité politico-sécuritaire au pays du président Evariste Ndayishimihe dont le régime tire ses origines de son activisme dans la rébellion hutue Forces pour la défense de la démocratie (FDD).
Plusieurs sources, notamment onusiennes, attestent une liaison entre le M23, contrôlant le territoire de Rutshuru et une partie des territoires de Nyiragongo et de Masisi dans la province du Nord-Kivu, avec le groupe armé Twirwaneho situé dans la province du Sud-Kivu où l’escalade des violences armées sera non sans impact négatif sur le Burundi, dont la capitale politique, Bujumbura, est reliée, par un pont, à Uvira, entité congolaise ayant officiellement rang de ville. Ce front est d’autant plus inquiétant pour la RDC que, d’une part, le M23 sert de paravent à l’armée rwandaise opérant également directement dans le Nord-Kivu et, d’autre part, le groupe armé Twirwaneho, identifié à la communauté Banyamulenge, jadis majoritaire dans la rébellion « Alliance des forces démocratiques pour la libération » (AFDL), alors soutenue par la coalition ougando-rwandaise et ayant imposé la défenestration du Président Joseph Mobutu.
Front congolo-burundais contre le M23
Pour émousser et étioler la liaison M23-Twirwaneho dans le but de prévenir d’éventuelles attaques des FNL sur son territoire, le Burundi se montre plus actif dans la lutte en appui aux FARDC contre les groupes armés tant burundais que congolais. Déployée, au départ, avec une marge d’action offensive sur le territoire congolais près de la frontière entre les deux pays, l’armée burundaise a obtenu, dans le cadre de la Force régionale de la CAE, son déploiement dans certaines localités du Nord-Kivu. Des sources sécuritaires indiquent que, de toutes les armées de la CAE déployées dans cette province en exécution du mandat de la CAE, seuls les éléments des Forces armées burundaises sont « plus actives », quoique non offensives, contre le M23. A ce stade, ils ne peuvent pas opérer à l’encontre du mandat de la CAE opposant cette communauté économique régionale au Gouvernement congolais souhaitant la voire plus agissante et intraitable envers le M23 contrairement à lentendement du mandat de cette Force régionale, par la CAE, considéré comme étant dinterposition.
En perspective de lévaluation de la Force de la CAE arrivant à échéance le 08 septembre, Bujumbura et Kinshasa seraient engagés dans des négociations pour des opérations militaires contre le M23, contrôlant des pans du territoire national à la frontière avec lOuganda et le Rwanda. Pour avancer vers un accord à cet effet, il sest avéré utile pour les deux pays d’encadrer leurs pourparlers par une base légale au niveau bilatéral, renseignent à INFOS.CD des sources diplomatico-sécuritaires. L’enjeu est d’une sensibilité qui pourrait exposer au pourrissement de la situation si Kampala n’adhère pas à cette initiative. La question pourrait être évoquée au prochain sommet de la CAE.
La rédaction