Alors que la Constitution souligne que les fonctions de président de la République sont incompatibles avec l’exercice de toute fonction dirigeante au sein d’un parti politique, les politiques ne manquent pas de formules pour contourner cette interdiction.
Le samedi dernier, l’Union sacrée de la nation, la méga plateforme de soutien à Félix Tshisekedi, a organisé un congrès extraordinaire pour se redynamiser.
Ce grand rassemblement organisé dans les locaux flambant neuf du centre culturel et artistique de l’Afrique centrale, a été ponctué par la présence du président de la République. La nouvelle charte et le nouveau règlement intérieur votés à l’unanimité lui consacre le titre de la « haute autorité politique ». Dans l’ancienne charte, il était « haute autorité de référence ».
Les textes imposent tous les membres le
« devoir de loyauté à la haute autorité politique ». Et, « suivant votre propre décision, évidemment le Secrétaire permanent a été consacré comme un organe, le Présidium a été maintenu sur votre propre décision et que ça soit dans la charte ou le règlement intérieur, nous-mêmes l’Union sacrée de la nation nous avons accepté de nous soumettre à un régime disciplinaire au cas où il nous arriverait de faillir à nos engagements », a résumé André Mbata, secrétaire permanent de l’Union sacrée.
C’est peu dire que le pouvoir decisionnel de la Haute autorité politique a été davantage renforcé dans cette organisation politique. Est-ce compatible avec la Constitution ? L’article 96 de la loi fondamentale de la RDC dispose que « les fonctions de président de la République sont incompatibles avec l’exercice de toute fonction dirigeante au sein d’un parti ».
Si ses soutiens défendent que « haute autorité politique » n’est pas une fonction dirigeante, mais elle plane au-dessus de toutes les fonctions. Dans tout ce que l’Union sacrée devrait entreprendre, le dernier mot reviendra à Félix Tshisekedi.
Pour l’opposant, Claudel Lubaya, cette mise en exergue de Félix Tshisekedi rappellerait le parti-Etat, sous la dictature de Mobutu.
« Le président fondateur [Félix Tshisekedi], à travers sa posture autoritariste, est dans la droite idée d’imposer au pays un parti unique (USN), une pensée unique (sa vision) et un seul chef (lui-même, Sese Seko, 100 ans au pouvoir !). Ce retour à l’ordre ancien ne passera pas. Le peuple l’avait rejeté sous Mobutu et sous tous les régimes qui lui ont succédé », a-t-il critiqué.
Titres honorifiques
Félix Tshisekedi n’invente pourtant pas la roue. Son prédécesseur, Joseph Kabila, avait, lui aussi, alors qu’il exerçait encore les fonctions de président de République, inventé le titre d' »autorité morale « , de l’Alliance de la Majorité présidentielle (AMP), de la Majorité présidentielle (MP) et plus tard du Front commun pour le Congo (FCC).
Jongler sur les titres honorifiques apparaît non seulement comme une manière de contourner des interdits constitutionnels, permet aussi au président en fonction de maintenir sa mainmise sur sa plate-forme politique, ce conglomérat de partis politiques où les luttes internes de positionnement sont très souvent sans merci. Il n’y a donc pas plus autoritaire que le dernier mot de « l’autorité morale » ou de la « haute autorité politique » pour imposer l’ordre et garder le contrôle. En Afrique, la parole du chef n’est-il pas sacrée ?
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