Alors que la République démocratique du Congo fait face à une guerre dans sa partie Est, le débat sur le fédéralisme relancé par l’opposant Olivier Kamitatu suscite de réactions. Lors d’un briefing spécial tenu lundi à Kinshasa, le porte-parole du gouvernement, Patrick Muyaya, a dénoncé le caractère inopportun d’un tel débat dans le contexte actuel.
« Ce n’est pas le moment de débattre sur le caractère fédéraliste ou unitaire du pays », a martelé Muyaya. Il a critiqué ceux qui, selon lui, cherchent à « déplacer le curseur » en évitant de condamner les atteintes à l’intégrité territoriale de la RDC. « Vous voulez parler du fédéralisme alors que vous n’avez jamais exprimé de solidarité envers vos compatriotes victimes de la guerre ? », s’est-il indigné, estimant que la priorité actuelle devait être « le retour à l’intégrité du pays ».
Le débat a été réactivé par une récente proposition d’Olivier Kamitatu, ancien ministre et directeur de cabinet de Moïse Katumbi, qui estime que la gouvernance centralisée actuelle a échoué à répondre aux défis majeurs de la RDC, en citant la mauvaise gestion des ressources naturelles, conflits armés, pauvreté persistante et inégalités croissantes.
Kamitatu plaide pour une transformation en profondeur du système politique congolais, en faveur d’un modèle fédéral articulé autour de cinq grandes régions : l’Orientale, l’Équateur, le Kongo, le Kasaï et le Katanga. Chacune de ces régions disposerait d’un gouvernement local élu, doté de compétences constitutionnelles claires, notamment la gestion des ressources naturelles et la définition de politiques adaptées à leurs réalités économiques et culturelles.
Selon lui, ce modèle permettrait une gouvernance de proximité, plus efficace et plus équitable. Il propose un partage des revenus issus des ressources naturelles, à hauteur de 60 % pour les régions productrices, tout en mettant en place un Fonds d’Égalisation Interrégional pour soutenir les zones les moins dotées. Le gouvernement fédéral, quant à lui, se verrait allouer 30 % des recettes nationales pour financer les missions régaliennes telles que la défense, la sécurité et la diplomatie.
Ce cadre du parti Ensemble pour la République affirme que cette réforme ne remettrait pas en cause l’unité nationale. « Le fédéralisme peut renforcer l’unité à travers la valorisation des identités régionales dans un cadre commun », explique-t-il. Il y voit aussi une solution pour mieux gérer les questions de sécurité, notamment dans les régions affectées par les conflits.
Ce débat soulève des interrogations fondamentales sur l’avenir institutionnel de la RDC. Mais pour le gouvernement, toute réflexion sur ce sujet ne peut avoir lieu sans avoir d’abord restauré la paix et l’intégrité du territoire.
Yvette Ditshima