Promulguée le 18 février 2006, la loi fondamentale, qui a ouvert la voie à la Troisième République et a permis l’organisation de quatre cycles électoraux, totalise dix-neuf ans d’existence dans un contexte où elle est menacée de toute part.
« Qui est celui-là qui va m’interdire, moi, le garant de la Nation, de ne pas le faire ? ». Cette phrase de Félix Tshisekedi, prononcée le 16 novembre 2024, Place de la gare de Lubumbashi (Haut-Katanga), est restée iconique. Ce jour-là, le chef de l’Etat réaffirmait sa volonté d’engager une réforme constitutionnelle, laquelle devrait aboutir soit à une simple révision de certains articles ou carrément à un changement de la loi fondamentale promulguée par Joseph Kabila 18 février 2016 après son approbation par référendum.
Estimant que ce texte contiendrait « plusieurs pièges » et serait rédigé « à l’étranger par des étrangers », le chef de l’Etat congolais avait promis de mettre en place, dès le début de l’année 2025, une commission interministérielle devant réfléchir sur un texte conforme aux « réalités congolaises ». On termine bientôt le deuxième mois de l’année et Félix Tshisekedi est plutôt occupé par la situation sécuritaire de plus en plus préoccupante dans l’est du pays. Le dimanche dernier, l’armée rwandaise, qui combat au nom du M23, s’est emparée de la ville de Bukavu, chef-lieu du Sud-Kivu. Trois semaines plutôt, c’était le tour de Goma, capitale du Nord-Kivu.
« Nous sommes dans un contexte exceptionnel où le pays est occupé par l’armée rwandaise. Ma préoccupation, pour le moment, c’est de bouter hors de nos frontières, l’agresseur. Il ne faut pas mélanger les choses », a déclaré Augustin Kabuya sur Top Congo, désormais muet sur la question du changement de la Constitution. Quelques semaines avant la chute de Goma, c’était pourtant une question de « vie ou de mort » pour le secrétaire général de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS). Ce dernier avait même lancé en novembre dernier une campagne de sensibilisation des structures nationales de son parti sur le bien-fondé du changement de la Constitution. Un débat qui avait déjà soulevé des passions et poussé l’opposition, qui dénonçait une manœuvre de Félix Tshisekedi à vouloir s’éterniser au pouvoir après ses deux mandats, à se réunir. Le cas de Joseph Kabila qui avait rencontré Moïse Katumbi à Addis-Abeba pour un front commun.
Dernier anniversaire de la Constitution ?
En tout cas, 19 ans après sa promulgation, la constitution congolaise est plus que jamais menacée de toute part.
Quand le pouvoir en place n’écartait pas l’idée de son changement, rien ne rassure non plus que la rébellion du M23 défendrait ce pacte républicain conclut tout justement pour éviter toute accession au pouvoir par les armes. Corneille Nangaa aura beau justifier son action militaire par l’article 64 de la Constitution, l’ancien président la Commission électorale nationale indépendante (CENI) reste aux antipodes des valeurs démocratiques et constitutionnelles.
Alors, qui pour sauver la Constitution du 18 février ? « Quel que soit l’issue de ce conflit, elle est peut-être en train de fêter son dernier anniversaire », estime, pessimiste, un analyste politique qui a requis l’anonymat. Pour lui, ni le pouvoir encore moins la rébellion ne défendra la loi fondamentale.
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