Dans un rapport publié ce mercredi, Human Rights Watch a peint un tableau peu reluisant de la situation des journalistes dans les zones sous occupation des rebelles du M23, soutenus par le Rwanda. A Goma, à Bukavu et dans d’autres localités sous bannière de l’Alliance fleuve Congo (AFC), les journalistes sont ciblés, menacés, harcelés et attaqués. Ces derniers mois, plusieurs professionnels des médias ont été placés en détention, notamment le directeur provincial de la RTNC au Nord-Kivu. Les détracteurs des actions des rebelles et les activistes de la société civile sont également pris à partie à Goma.
« Dans les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, les combattants du M23 ont fait des descentes dans des maisons et proféré des menaces de mort et de représailles, sapant le travail des médias indépendants et d’organisations de la société civile », déplore Human Rights Watch qui a mené des entretiens avec des journalistes nationaux et étrangers. Ces derniers ont notamment avoué avoir subi des pressions de la part du M23 pour orienter leurs publications.
Des accréditations données depuis Kigali
L’organisation de défense des droits de l’homme a exhorté les rebelles et leur parrain à permettre aux journalistes de « travailler et de se déplacer librement » alors qu’ils recourent, depuis leur prise de pouvoir, aux « menaces » et à « l’intimidation » en vue de « restreindre l’accès de la population à l’information et étouffer les voix critiques ».
« Les journalistes ont déjà rencontré des difficultés pour rendre compte de la situation à Goma », poursuit le rapport.
Autre élément inquiétant soulevé par le rapport de Human Rights Watch, l’influence rwandaise dans la délivrance des autorisations médiatiques. Plusieurs journalistes ont témoigné avoir été obligés « de présenter une accréditation de presse rwandaise pour être autorisés à franchir la frontière pour rejoindre Goma ».
Des informations confirmées par Lawrence Kanyuka, porte-parole de l’AFC, qui a cependant indiqué qu’une accréditation de presse ougandaise était aussi valable. Pour les journalistes étrangers, l’entrée à Goma est également soumise au remplissage d’un formulaire détaillé sur le sujet et la nature de leurs reportages mais aussi les lieux où ils souhaitaient travailler. Côté coût, ces accréditations coûteraient entre 500 et 1.000 dollars américains.
Au Rwanda, des hauts responsables rwandais dont Vincent Karega, ambassadeur itinérant du Rwanda pour la région des Grands Lacs, sont impliqués dans les opérations des transferts de journalistes à Goma. « La décision du Rwanda de traiter les accréditations de presse pour les zones contrôlées par le M23 est révélatrice de la proximité du pays avec le groupe armé », explique le rapport.
Clémentine de Montjoye, chercheuse senior sur la région des Grands Lacs à Human Rights Watch, a ainsi appelé à plus de pression sur le Rwanda pour permettre aux journalistes « de travailler sans restrictions inutiles qui exposent les civils à un risque accru » dans un contexte difficile où les populations locales ont plus que jamais besoin d’accéder aux informations essentielles et à des actualités fiables.
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