Le 29 février dernier, le procureur général près la Cour de cassation, Firmin Mvonde, publie les conclusions de l’enquête sur la mort de l’opposant Chérubin Okende dont le corps a été retrouvé le 13 juillet dans une rue de Kinshasa à bord de son véhicule. Le magistrat atteste que l’ancien ministre des Transports s’était « suicidé ». Une version rapidement rejetée par la famille et les proches du défunt. Un scénario qui rappelle bien une autre affaire presque similaire au pays, celle de l’assassinat de l’activiste des droits de l’homme Floribert Chebeya en 2010.
1. Rendez-vous
La veille de la découverte de son corps, Floribert Chebeya, coordonnateur de la Voix des sans voix, une organisation de défense des droits de l’homme, avait rendez-vous dans les locaux de la police avec le général John Numbi, alors inspecteur général de la police, selon le témoignage des membres de son organisation.
Le 12 juillet 2023, un jour avant la découverte de son corps, Chérubin Okende, ancien député national et ministre des Transports aurait été vu pour la dernière fois au parking de la Cour constitutionnelle le 12 juillet. Selon la version de son garde du corps incarcéré depuis, il se serait rendu à la haute Cour pour introduire une demande de report de son rendez-vous prévu le 13 juillet devant le juge concernant la déclaration de son patrimoine en tant qu’ancien ministre des Transports.
2. Disparition
Floribert Chebeya et Chérubin Okende ne sont jamais revenus de leur rendez-vous respectif. Leurs proches avaient signalé leur disparition avant la découverte macabre.
3. Véhicule
Chebeya, qui avait aussi pris la précaution d’écrire à sa femme pour l’informer de son rendez-vous, sera retrouvé mort le lendemain, à bord de son véhicule dans le quartier Mitendi.
Même scénario pour Chérubin Okende dont le corps, ensanglanté, sera retrouvé à bord de son véhicule sur l’avenue des Poids lourds le 13 juillet dans la matinée.
4. Enquête controversée
Les deux affaires ont aussi en commun la controverse autour de la recherche de la vérité.
Pour le cas de Chebeya, la police avait privilégié au départ l’hypothèse d’une aventure sexuelle de Chebeya qui aurait mal tourné (on pouvait voir des préservatifs à côté de son corps). Une version rejetée par la famille et les organisations des droits humains qui ont mis en avant un assassinat dans les locaux de la police après torture. Alors que certains officiers de la police ont été jugés et condamnés dans cette affaire quelques années après, les proches de Chebeya continuent d’exiger la comparution du général John Numbi qu’ils présentent comme le cerveau moteur de l’assassinat de l’activiste et de son chauffeur Fidèle Bazana.
Aujourd’hui, pour le cas de Chérubin Okende, sa famille et son parti Ensemble pour la République contestent également les conclusions de l’enquête du procureur qui ont abouti à un suicide. Les proches de Chérubin Okende privilégient la piste d’un assassinat qui serait commandité par les renseignements militaires, à en croire un article publié le 31 août 2023 sur le site de Jeune Afrique, s’appuyant sur une note interne attribuée au département de sécurité interne de l’Agence nationale des renseignements (ANR). Ce fameux document, jugé de faux par les autorités, est à la base de la détention du journaliste Stanis Bujakera Tshiamala, correspondant de Jeune Afrique, alors que l’article s’y rattachant ne porte pas sa signature. Depuis novembre dernier, la famille du défunt a d’ailleurs porté plainte en Belgique contre le chef des renseignements militaires congolais, Christian Ndaywel.
La rédaction