Depuis son lancement en RDC, la Force régionale pâtit d’un manque de budget. Alors que la Communauté d’Afrique de l’Est souhaite accélérer son déploiement, le personnel civil hausse le ton.
Le 9 février, les chefs d’état-major de la Communauté d’Afrique de l’Est (EAC) se sont retrouvés à Nairobi pour tenter de donner un second souffle au projet de Force régionale de l’EAC (EACRF) qui, ces derniers mois, fait l’objet d’un nombre croissant de critiques, alors que les combats entre l’armée congolaise et le M23 se poursuivent.
Kinshasa reproche à l’EACRF sa passivité face aux rebelles et continue de plaider en faveur d’un mandat offensif.
« Démotivation » et « mépris »
Dans la pratique, la priorité a pour le moment été donnée au processus politique. À Nairobi, un troisième calendrier a été élaboré, qui prévoit, cette fois, un retrait des rebelles des terres conquises d’ici au 30 mars. Un nouveau découpage des zones d’opération de l’EACRF a aussi été effectué. La question du financement, en revanche, n’a pas été mentionnée dans le rapport final de la réunion. Elle est pourtant, au-delà des divergences stratégiques à propos du mandat de la force, l’un des problèmes récurrents de celle-ci.
Si l’on se fie aux statuts de l’EACRF, chaque contingent est, en principe, censé se prendre en charge financièrement. Mais, étant donné les limites des États participants, le budget s’avère trop maigre pour le moment. Un problème qui affecte aussi bien les contingents militaires que le personnel civil. Une note interne, intitulée « Situation au quartier général de la force », que Jeune Afrique a pu consulter, relève « une démotivation [des] agents [civils] ».
Depuis l’installation du QG à Goma, « une cinquantaine des staffs civils, subdivisés en trois catégories (agents cadres, agents moyens et agents de propreté), ont été recrutés au fur et à mesure, en tant que personnel d’appoint », précise le document. Ces derniers affirment accuser des « arriérés de paiement » de plusieurs mois et s’en être plaints à plusieurs reprises aux responsables de la force, dont ils dénoncent le « mépris ».
« À l’issue de cette demande mal jugée par les responsables congolais au sein de l’EACRF, il a été révélé aux agents que bien qu’ils aient commencé à travailler à partir de juillet 2022 pour les uns, août et novembre 2022 pour les autres, les chefs d’état-major des forces armées des pays membres de l’EAC auraient décidé du 20 décembre 2022 comme date de début de la mission, jetant à l’eau par conséquent tous les efforts et sacrifices consentis jusqu’à ce jour par la cinquantaine d’agents civils de l’EACRF », détaille le texte. Lequel précise aussi que la question a par ailleurs été débattue lors de la réunion des experts budgétaires, début janvier, sans que cela ait été pris en compte dans le budget.
100 millions de dollars Contacté par JA, l’état-major de l’EACRF n’a pas encore donné suite à nos sollicitations à l’heure où nous publions cet article. De son côté, le ministre congolais des Affaires étrangères, Christophe Lutundula, nous a précisé que le paiement du personnel civil était de la responsabilité du secrétariat général de l’EAC, qui gère la force régionale, et avec lequel la RDC a des rapports tendus.
Lors d’une conférence de presse, le 13 février, le chef de la diplomatie congolaise a affirmé que la RDC avait fourni une « contribution substantielle » au budget de la force régionale, sans en préciser le montant exact, tout en ajoutant que le coût global s’élèverait à « pas moins de 100 millions de dollars pour six mois ».
Avec Jeune Afrique