Tout internationaliste digne de ce nom retient par cœur cette subtile et intelligible définition de la puissance, dans le contexte des Etats, donnée par le Français Serge Sur, professeur de droit international et relations internationales à l’Université Panthéon-Assas : « Une capacité de faire, de faire faire, d’empêcher de faire, de refuser de faire ».
Usant de son statut de « grande puissance » sur la scène internationale, les États-Unis d’Amérique ont annoncé une trêve humanitaire à dater de ce vendredi à minuit, dans l’Est de la RDC où le Rwanda de Paul Kagame alias M23, pour les raisons de la cause, n’arrête de répandre le malheur parmi les millions de Congolais, premières victimes d’une guerre qu’ils n’ont pas demandée.
Qui sont-ils, ces deux pays, pour dire non à cet ordre des USA ? « Les gouvernements de la RDC et du Rwanda ont exprimé leur soutien à cette trêve humanitaire de deux semaines pour atténuer les souffrances des populations vulnérables et créer les conditions d’une plus grande désescalade des tensions dans l’Est de la RDC », a souligné, dans son communiqué, Adrienne Watson, porte-parole du Conseil national de sécurité des États-Unis.
Un simple communiqué et on ne discute pas. Le pays de Biden a effectivement « empêché » la poursuite des combats, des déplacements massifs, de l’incongruité… Question de faciliter le retour volontaire des déplacés et le travail du personnel humanitaire qui doit bénéficier d’un « accès sans entrave aux populations vulnérables ».
Les mots sont bien choisis. Une ingérence humanitaire à saluer. Jusqu’à ce que cette question traverse les esprits : qu’est-ce qui empêche alors cette grande puissance d’« empêcher » définitivement le Rwanda, qu’elle identifie clairement comme agresseur, de continuer son aventure inhumaine sur le sol de son voisin ? Sûrement pas sa capacité à faire faire au Rwanda ce que l’administration Obama avait fait en 2013. A l’époque, alors que le même M23 s’était d’ailleurs emparé de la ville de Goma, une parole de la Maison blanche avait suffit pour que Kagame retire ses pions. Ne pas le faire aujourd’hui et se contenter des trèves à courte durée, résonne clairement comme une volonté de Washington de laisser « faire » Kigali. C’est refuser carrément de faire de l’Est de la RDC une zone de paix. C’est en réalité se foutre de ces millions de déplacés dont on dit se préoccuper du sort. C’est légitimer la thèse selon laquelle, le Rwanda n’est qu’un pion des forces internationales pour déstabiliser la RDC et s’accaparer de ses ressources naturelles qui n’ont jamais été aussi stratégiques qu’avant.
Socrate Nsimba