L’année 2022 n’aura pas été aussi meilleure qu’envisagée par le Président de la République Félix Tshisekedi dans son message de voeux adressé aux Congolais le 31 décembre 2021.
En effet, au cours de l’année achevée il y a environ trois semaines, le Chef de l’État avait promis de rendre à la RDC ses lettres de noblesse et d’en faire un pays plus fort et plus beau qu’avant. Un voeu contrastant avec la réalité marquée notamment par l’activisme des groupes armés et, de là, l’absence de l’autorité de l’Etat sur plusieurs pans du territoire national.
« J’aimerais par ces vœux vous réitérer l’engagement que j’ai pris devant l’Assemblée nationale et le Sénat réunis en Congrès, qui est d’œuvrer dans le sens de rendre à la République démocratique du Congo ses lettres de noblesse et d’en faire un pays plus fort et plus beau qu’avant. Toutefois, je ne pourrais le faire seul. C’est uniquement par la conjugaison de nos efforts à tous, mes chers compatriotes, que nous y parviendrons et que nous ferons de cette terre richement bénie, un réel havre de paix, de prospérité et de progrès social », a dit le président Tshisekedi.
Malgré l’état de siège en vigueur depuis le 06 mai 2021, le rêve ci-haut de Félix Tshisekedi peine à devenir réalité.
Nous revenons ici sur la diplomatie multilatérale de la RDC au cours de l’année 2022.
La diplomatie multilatérale au niveau classique
Dans son discours d’investiture du 24 janvier 2019, le Président Félix Tshisekedi n’avait pas dissimulé ses ambitions quant aux relations entre son pays et les instances de coopération multilatérale.
«Je souhaite impulser une meilleure présence de notre pays dans les instances internationales, à la hauteur de notre vocation naturelle. (…) Notre pays est un carrefour au cœur de l’Afrique. A ce titre, il fait la jonction entre toutes les zones géographiques du continent », avait-il déclaré.
Et d’ajouter: « Nous envisageons l’intégration de la République démocratique du Congo à la Communauté des États d’Afrique de l’Est – la CEA- dont la majorité des pays membres sont frontaliers et avec lesquels nos citoyens, à l’Est du pays, engagent des échanges économiques importants depuis plusieurs décennies. »
Félix Tshisekedi peut s’en féliciter, ne serait-ce qu’au niveau formel. En effet, en 2022, la RDC a pris la tête pour un mandat d’un an de la CEEAC (Communauté économique des Etats de l’Afrique centrale), du Mécanisme régional de suivi de l’Accord d’Addis-Abeba, de la SADC (Communauté de développement de l’Afrique australe).
En outre, elle a été admis au sein de l’EAC (Communauté de l’Afrique de l’Est) quoique le processus de l’effectivité de sa qualité de membre soit toujours en cours à cause des exigences d’implémentation avérée des politiques de cette communauté par Kinshasa.
Dans la pratique, le Mécanisme régional de suivi de l’Accord d’Addis-Abeba est resté inopérant en 2022 et devrait être placé sous la conduite du Burundi en février.
La CEEAC a, quant à elle, désigné Félix Tshisekedi facilitateur à la résolution de la crise politico-sécuritaire au Tchad. Preuve, si besoin est, de la reconnaissance des qualités de fin négociateur du Chef de l’Etat congolais qui n’a pas encore réussi à faire aboutir avec succès cette délicate mission.
A la SADC, la RDC peine à faire montre d’exemplarité en matière d’industrialisation sous le label duquel porte sa présidence.
Malgré sa présence à la tête de ces organisations, la RDC n’a pas pu, en 2022, mobiliser ces organisations intergouvernementales en soutien aux efforts de pacification de l’Est du pays en proie à la spirale des violences armées. Alors qu’en 2013, la SADC avait non seulement condamné l’agression rwandaise mais aussi appuyé Kinshasa au travers de la Brigade d’intervention.
Dans le communiqué final de leur dernier sommet tenu en août 2022 à Kinshasa, les chefs d’Etat et de Gouvernement des pays de l’Afrique australe n’ont pas réédité cette ligne diplomatique. Sans doute, mécontents de la préférence de la RDC pour l’EAC dont est issue la Force régionale déployée pour la résolution de la crise inhérente au M23. Sur terrain, la présence de la Force régionale est pourtant en deça de l’échec, font remarquer des observateurs.
Par ailleurs, malgré ses intenses activités à l’Union africaine et aux Nations Unies en 2022, la RDC n’a obtenu ni la condamnation de l’agression rwandaise ni des sanctions contre le M23 contrairement à 2013. En dépit de la signature de la Feuille de route de novembre 2022 en vue de la restauration de la paix dans l’Est du pays, la situation y demeure critique. L’EAC, qui pilote le processus de Nairobi sur le dialogue avec les groupes armés, et celui de Luanda, menée par la CIRGL à l’initiative de l’UA, ne sont encore parvenus à faire taire les armes dans l’Est de la RDC.
Comme l’a reconnu Félix Tshisekedi dans son message du 03 novembre 2022 à la nation : « Une fois de plus, aucune avancée sur le terrain de la paix attendue par notre population n’a été observée » en dépit des efforts diplomatiques.
La diplomatie multilatérale au niveau spécifique
En septembre 2022, Félix Tshisekedi a participé, à Rotterdam, à un sommet sur l’Adaptation de l’Afrique au rechauffement climatique tenu en l’absence de haut-dirigeants des pays industrialisés. La RDC, qui se présente en «pays solution» dans la lutte mondiale contre le changement climatique, n’a pas encore réussi à persuader ses interlocuteurs quant au bienfondé de sa capacité à jouer ce rôle ni à mobiliser des ressources financières à cet effet.
Malgré la grande majorité des forêts du bassin du Congo situées sur son territoire, la RDC ne constitue pas l’interlocuteur de la région avec les partenaires extérieurs engagés dans la promotion de la conservation de cette richesse, second plus grand massif forestier tropical au monde.
Par ailleurs, Kinshasa a mis aux enchères ses blocs pétroliers et gaziers dont les résultats, au-delà des protestations et inquiétudes, pourraient être évalués en 2023 courant.
La diplomatie congolaise, qui devrait subir des ajustements stratégiques à la suite de la douzième conférence diplomatique tenue fin février 2022 à Kinshasa, devrait gagner le pari de « briser l’isolement la République démocratique du Congo » comme l’avait affirmé le chef de l’Etat à l’ouverture de ces assises. Ceci est loin de refléter la réalité qui appelle à une évaluation de près de cent recommandations ayant sanctionné cette édition de la Conférence diplomatique congolaise pour y redonner une bouffée d’oxygène en ce début d’année coïncidant avec les quatre ans de Félix Tshisekedi à la tête du pays.
Lembisa Tini