Aucun doute. Secret de polichinelle. Félix Tshisekedi est candidat à sa propre succession. Dès lors, ses choix politiques participent non seulement de la gouvernance du pays découlant de son investiture à la tête de la RDC, mais surtout de la préparation de ses éléments de langage en perspective de la prochaine élection présidentielle officiellement prévue le 20 décembre 2023. Le très risqué Programme de développement local des 145 territoires (PDL-145T) est, à n’en point douter, une stratégie de tentative de corriger les fâcheux ratés de précédents programmes (100 jours, Tshilejelu) qui ont fait tâche d’huile.
Par ailleurs, la réapparition du Mouvement du 23 mars remet en cause la stratégie sécuritaire du pouvoir axée sur l’état de siège, le summum des mesures exceptionnelles. Alors que, devant les députés nationaux en 2021, Sama Lukonde avait envisagé et promis la proclamation de l’état d’urgence en Ituri ainsi qu’au Nord et Sud-Kivu. La mise en œuvre de cette dernière option en aurait rendue aisée des évaluations pour, éventuellement, autoriser le passage ou non à l’état de siège. Hélas !
L’élaboration, à ce stade, des éléments de langage sur le volet sécuritaire ne pourrait contredire les tristes réalités que les populations de l’Est, le centre du jeu électoral en 2006, 2011 et 2018, expérimentent au quotidien. Une promesse de plus à leur faire? Certainement pas. «Mieux vaut mille refus qu’une promesse non tenue», selon un proverbe chinois.
La fermeté de Félix Tshisekedi doublée de son intransigeance de négocier avec ce “mouvement terroriste” ont semblé donner émotionnellement satisfaction à plusieurs Congolais… Ils sont fiers de cette affirmation de la dignité de leur chère patrie, ne serait-ce que dans les mots en attendant de réunir les conditions nécessaires pour les traduire en actes.
Cette fermeté, que le Conseil de sécurité de l’ONU – dont les représentants des membres ont tout récemment séjourné à Kinshasa puis à Goma – ne semble pas partagée, mettrait en difficulté des initiatives diplomatiques en cours sur la crise dans l’Est du pays. Difficile, dans ce contexte, pour la Commission électorale nationale indépendante (CENI) de mener ses opérations d’identification et d’enrôlement des électeurs dans une partie du Nord-Kivu, occupée par le M23.
Négocier avec ce “mouvement terroriste “, c’est, pour Félix Tshisekedi, renoncer à la caution du soutien de ceux qui ont apprécié sa dureté langagière contre ce groupe armé et, surtout, le Rwanda de son (ex?) “frère” Paul Kagame. En même temps, c’est perdre le peu de marge qu’il aurait pour tenter d’affûter ses éléments de langange sur la situation sécuritaire dans le but de persuader les électeurs malgré le résultat mitigé.
Dès lors, la fermeté face au M23 serait, à moyen terme, l’option plus ou moins bénéfique pour Félix Tshisekedi. Quoique cela entraînerait le report des élections dont le glissement s’avère de plus en plus évident.
Problème ? L’incertitude quant à la capacité de Félix Tshisekedi de fédérer, autour de lui, les Forces politiques et sociales contre le M23 et sur les élections comme ce fut le cas contre le FCC du “Raïs” en fin 2020. Le report des élections, suite au M23, pourrait, faute d’un fort soutien interne, affaiblir, à terme, le pouvoir et le mettre dans l’impasse. Une situation qui pourrait amoindrir les chances d’une réélection aisée du candidat naturel de l’UDPS.
Les qualités de tribun de Félix Tshisekedi, héritées de son père, le rapprocheraient de l’éloquent et audacieux Laurent-Désiré Kabila dont le fils, taiseux, n’aurait pas assez à reprocher à la nature suite à son ipséité assez énigmatique pour rester 18 ans au pouvoir dans un Etat, au départ, émietté.
Lembisa Tini (PhD)
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