Après l’élimination dès le second tour de la Ligue des champions africaine du club dont il est propriétaire et président, l’ancien gouverneur du Katanga a pris des décisions radicales. De quoi refaire briller l’étoile des Corbeaux et la sienne, par la même occasion ?
Ce 15 octobre, au moment où les autres grands clubs africains (Espérance Tunis, Raja Casablanca, Wydad Casablanca, Al Ahly, Zamalek) validaient leur qualification pour la phase des groupes de la Ligue des champions de la Confédération africaine de football (CAF), le Tout Puissant Mazembe s’inclinait dès le second tour, battu par les modestes ougandais de Vipers Sports Club (0-0 ; 2-4 aux tirs au but). Une défaite qui a ouvert une profonde crise et poussé le président du club et ancien gouverneur du Katanga, Moïse Katumbi, à des décisions radicales.
Ce dernier s’est séparé de l’entraîneur français Franck Dumas, nommé au mois d’août 2021, et l’a remplacé par Pamphile Mihayo, un ancien joueur du club, déjà passé sur le banc de touche des Corbeaux. Il a également limogé deux autres membres du staff technique puis a dissous le comité directeur, gardant juste en poste le secrétaire général, Hilaire Kabila.
Préjudiciable sportivement, la contre-performance du TP Mazembe l’est également économiquement. Rien qu’en atteignant la phase des groupes, le club était assuré de toucher 550 000 euros. S’il s’était hissé en quarts de finale, cela lui aurait rapporté 650 000 euros, 875 000 pour les demi-finales. Quant au club finaliste, il empoche 1 250 000 euros – le vainqueur gagne le double.
Réduire la voilure
S’il continue à dominer le football congolais – il a remporté cinq des sept derniers championnats –, le TP Mazembe a vu son étoile pâlir en Afrique. Depuis que Moïse Katumbi a repris le club en 1997, il a remporté trois Ligues des champions de la CAF (2009, 2010, 2015), deux coupes de la CAF (2016, 2017) et trois Supercoupes de la CAF (2010, 2011, 2016).
« Mais ces cinq dernières années, Mazembe ne brille plus sur la scène continentale, car les moyens économiques mis à sa disposition ne sont plus aussi importants qu’avant. Certains joueurs touchaient de très gros salaires, tout comme les entraîneurs. Depuis quelques années, c’est fini. Les salaires restent attractifs, mais cela n’a rien à voir. Katumbi a réduit la voilure. La crise sanitaire est passée par là, et son exil politique de trois ans (2016-2019) n’a pas arrangé les choses. Quand le patron n’est pas là, la machine ne fonctionne pas comme elle le devrait », explique une source congolaise sous couvert d’anonymat.
L’époque où le président faisait venir de bons joueurs africains, en payant parfois des transferts et en offrant de bons salaires, apparaît quasiment révolue. À présent doté d’une académie, le TP Mazembe mise avant tout sur les joueurs qu’il forme lui-même.
« Le problème est que ces jeunes ont besoin de temps. Et le temps, en football, a fortiori dans un club comme Mazembe où il faut avoir des résultats immédiats, n’est pas le meilleur allié », poursuit cette même source.
Outil politique
À un peu plus d’un an de la date prévue pour la présidentielle en RD Congo, la réussite du TP Mazembe serait aussi de bon augure politiquement pour son président. Si ce dernier n’a pas dénoncé l’alliance qu’il a formée avec Félix Tshisekedi, Moïse Katumbi entretient désormais des relations difficiles avec l’entourage présidentiel et réfléchit de plus en plus à une candidature à la magistrature suprême.
« Au Katanga, il a fait des routes, construit des hôpitaux, des écoles, rénové des universités, amélioré la sécurité, donné accès à l’eau potable à une majorité de la population, fait augmenter les salaires… Mais en plus, il est à la tête d’un club qui rayonnait non seulement en RDC, mais aussi en Afrique. Le sport, pour l’image, est quelque chose de très important et peut rapporter des voix », poursuit notre source.
S’il se lançait dans la course à la présidentielle, de bons résultats du TP Mazembe ne pourraient qu’être bénéfiques à Katumbi. Pour le club, le cap fixé pour la suite de la saison est clair : gagner le titre de champion de RDC et aller le plus loin possible en Coupe de la CAF, où il a été reversé après son élimination en Ligue des champions.
Avec Jeune Afrique