Au Gabon, le CTRI a annoncé avoir nommé à sa tête Brice Clotaire Oligui Nguema, commandant en chef de la garde républicaine. Un général formé au Maroc et originaire du Haut-Ogooué, le berceau des Bongo.
Ce mercredi matin, son nom a d’abord été scandé par les éléments de la garde républicaine, dont il est le commandant en chef, au sein même du palais présidentiel. Puis, peu de temps après, la confirmation est tombée : Brice Clotaire Oligui Nguema est désormais le président du Comité pour la transition et la restauration des institutions (CTRI), qui a annoncé qu’il prenait le pouvoir, à Libreville ce 30 août, à la télévision nationale Gabon 24.
Ex-aide de camp d’Omar Bongo Ondimba
Brice Clotaire Oligui Nguema n’est pas un inconnu des Gabonais, tant il fréquente les arcanes du pouvoir des Bongo depuis des décennies. Originaire de la province du Haut-Ogooué, le berceau de la famille de l’ancien président Omar Bongo Ondimba (OBO), à laquelle sa mère était apparentée, il avait vu le général André Oyini le prendre sous son aile et lui faire gravir les échelons au sein de l’armée.
Dans les rangs du CTRI ce 30 août figure d’ailleurs également Aimé-Vivian Oyini, fils de feu André Oyini et aujourd’hui chef d’état-major de la garde républicaine. Les deux hommes se connaissent donc de longue date et particulièrement bien. Formé à l’académie royale militaire de Meknès, au Maroc, et bénéficiant du parrainage de l’influent général et de son lien familial avec le chef de l’État, Brice Clotaire Oligui Nguema va devenir l’un des aides de camp d’Omar Bongo Ondimba.
« Il faisait partie des “petits” du président, qu’on voyait passer dans les couloirs », se souvient Anne-Marie Dworaczek-Bendome, ancienne collaboratrice d’OBO. L’ancien de Meknès reste au côté du président jusqu’au décès de ce dernier, en 2009 à Barcelone. Cependant, en délicatesse avec une partie de la famille du défunt, notamment avec le futur président Ali Bongo Ondimba (ABO), il est écarté de Libreville et envoyé en service à l’étranger.
L’exil, puis le retour
Attaché militaire du Gabon au Maroc puis au Sénégal, il passe dix années en exil. Il ne rentre qu’en 2019, sous l’impulsion notamment de Brice Laccruche Alihanga, qu’il connaît depuis son enfance et qui est alors directeur de cabinet d’ABO : un an après l’accident vasculaire cérébral du président, que Oligui Nguema considère comme son cousin, et surtout peu de temps après une tentative de coup d’État infructueuse mais dans laquelle la garde républicaine aurait été impliquée, le gradé est rappelé au Gabon. Il prend la tête de la puissante Direction générale des services spéciaux (DGSS), les renseignements de la garde républicaine.
Brice Clotaire Oligui Nguema y remplace Frédéric Bongo, le demi-frère du président, lui-même mis à l’écart après s’être attiré des inimitiés au sein du clan familial. « Fred », comme un symbole, est alors nommé… attaché militaire du Gabon en Afrique du Sud. À l’époque, Oligui Nguema affirme à qui veut l’entendre son indéfectible soutien au chef de l’État, au point qu’il est porté, en avril 2020, à la tête de la garde républicaine.
« Une révolution de palais »
Commandant en chef, il modifie même le slogan de ce régiment, qui jure fidélité au président et non plus à la patrie. Le général de brigade (deux étoiles) fait ensuite en sorte de raffermir sa mainmise sur la garde républicaine, verrou du pouvoir d’Ali Bongo Ondimba.
Très apprécié par ses hommes et ayant permis une grosse augmentation des effectifs, il a également obtenu que son régiment soit l’un des mieux équipés du pays. En 2023, en prévision des élections, il a encore reçu quatre blindés légers AML-90 et recruté 679 nouveaux agents.
Le CTRI soutient désormais qu’il assure, provisoirement, la gestion du pays. Ali Bongo Ondimba, lui, se trouve en résidence surveillée et ne semble visé par aucune accusation. Plusieurs de ses proches ont en revanche été arrêtés et font l’objet d’une enquête pour « trahison contre les institutions de l’État, malversations financières internationales en bande organisée » ou encore « trafic de stupéfiants et falsification de signature ».
Tous sont des proches de Noureddin Bongo-Valentin et de la première dame, Sylvia Bongo-Ondimba. À l’heure actuelle, celle-ci n’est plus au côté d’Ali Bongo Ondimba, avec lequel Jeune Afrique a pu s’entretenir. « C’est avant tout une révolution de palais, d’une branche de la famille contre une autre », souligne un ancien du Palais du bord de mer.
Avec Jeune Afrique