Kinshasa sera-t-il prêt à accueillir les IXèmes Jeux de la Francophonie fin juillet 2023 ? A moins d’une année du rendez-vous déjà reporté à deux reprises et à sept mois de la remise officielle des infrastructures au comité organisateur, INFOS.CD a visité les chantiers aux stades des Martyrs et Tata Raphaël. Le constat est alarmant : la plupart de travaux sont au niveau de la fondation.
« La mauvaise décision aurait été que les Jeux soient annulés. Mais le fait qu’on ait reporté nous donne l’occasion de travailler sereinement, de faire les choses correctement et d’organiser des Jeux grandioses ».
Réagissant en février dernier à la décision du Conseil permanent de la Francophonie de reporter une fois de plus les IXèmes Jeux de la Francophonie, Isidore Kwandja Ngemba, directeur national de l’évènement, affichait un optimisme à toute épreuve. Lui qui avait pris fraîchement la gestion des choses après la mise à l’écart sur fond de gabegie financière du Haut représentant du chef de l’État Didier Tshiyoyo.
Six mois après, les choses sont-elles organisées correctement et sereinement ? INFOS.CD s’est glissé discrètement à sa suite le lundi dernier lors de sa visite d’inspection dans les chantiers de deux principaux stades de Kinshasa : Martyrs et Tata Raphaël.
Malgré deux reports – le premier à cause de la pandémie de Covid-19 et le deuxième beaucoup plus à cause du retard dans la préparation des infrastructures -, la capitale congolaise ne semble toujours pas prête pour l’évènement.
Isidore Kwandja n’a d’ailleurs pas caché sa déception d’évaluer le niveau d’exécution des travaux à 35 pour cent.
Près de 4 000 athlètes et délégations du monde culturel et sportif francophone sont attendues du 26 juillet au 6 août 2023 à Kinshasa pour ces Jeux. Selon le chronogramme, toutes les infrastructures pour les accueillir devraient être prêtes cinq mois avant le rendez-vous.
Mathématiquement, il ne reste que sept mois aux différentes équipes pour achever les travaux. Ce qui est loin, alors loin d’être faisable à l’allure où vont les choses.
Au stade des Martyrs, où sont exécutés les travaux de construction d’un gymnase jumelé, d’un stadium de basket-ball, d’un centre d’informations techniques, en plus des travaux de réhabilitation et de modernisation du terrain annexe de football et d’athlétisme, d’assainissement, d’installation électrique, d’approvisionnement en eau potable et de gestion des eaux usées sans oublier la clôture, tout ou presque est au niveau préliminaire. Dans certains sites, il y a même carence d’ouvriers.
Par exemple, au centre d’informations techniques où seront installées l’administration des Jeux et la grande salle informatique, on est loin de constater les 75% d’exécution des travaux annoncés officiellement.
Un architecte responsable du chantier trouvé sur place nous explique que ce décalage constaté est dû à l’ajout de certains travaux non prévus dans le premier planning. Il ne sait pas non plus dire avec exactitude quand est-ce que l’infrastructure sera remise.
Non loin de là, les travaux de construction du gymnase jumelé sont encore au niveau de la fondation. Idem pour les travaux de réhabilitation et de modernisation du terrain annexe. Le grand collecteur pour la gestion des eaux usées est buté à deux obstacles qui l’empêchent de progresser : un grand tuyau de la Regideso et un ancien grand collecteur. Aucun avancement concernant les travaux de l’enclos du stade. La petite satisfaction vient des installations électriques et de l’approvisionnement en eau potable mais aussi du stade de basket-ball qui attend être recouvert avant l’installation du nouveau parquet.
Au stade Tata Raphaël, tous les travaux ou presque sont au niveau de la fondation en commençant par le chantier de construction des hébergements des athlètes et artistes qui attend des préfabriqués commandés à l’extérieur du pays. Des sites de construction du hall de tennis, du gymnase omnisports pour le judo et de l’arène de la lutte africaine sont également dans une phase préliminaire.
Dans l’enceinte du football, aucun ouvrier signalé. Les travaux se sont arrêtés brusquement au niveau de l’installation des lumières. Seulement une partie des gradins a reçu un coup de crépissage.
A l’arène de la lutte africaine, les travaux de construction des gradins avancent relativement bien, sauf le reste.
Au stade des Martyrs comme au stade Tata Raphaël, le délai de tous ces travaux est largement dépassé, essentiellement à cause du retard dans le paiement des factures par le gouvernement, apprend-t-on des différents chefs de chantiers. Ils avouent que le taux de financement est jusqu’à présent de 30 %. Les factures introduites par toutes les entreprises depuis mai attendent toujours le paiement.
Dans le village des Jeux et le lieu d’hébergement, un responsable de l’entreprise maître d’ouvrage se plaint de la « lourdeur administrative » dans le décaissement des fonds et alerte sur le « blocage qui arrive ».
« Les factures que nous [toutes les entreprises concernées] avons tous livrées depuis le mois de mai ne sont pas encore payées. Pendant ce temps, le délai court », se plaint-il.
Les assurances affichées par les autorités gouvernementales à chaque fois qu’elles sont interrogées sur le financement des travaux contrastent avec la réalité sur le terrain. Certains, dans la ville, ironisent sur des chantiers « maudits ».
En cas d’un nouveau retard, il n’est pas sûr que l’OIF va maintenir ces IXèmes Jeux à Kinshasa.
INFOS.CD