La date du 06 août 2023 sera indéniablement inscrite dans les annales de la Francophonie. Tant cette date marque la fin de la neuvième édition des jeux de la Francophonie à Kinshasa. La réalité du déroulement des compétitions sportives et des concours culturels a été une agréable surprise. Pour plus d’un … en RDC et au-delà.
D’autant plus qu’il était difficile de forcer l’optimisme pour s’y attendre. Diverses raisons au passage : large retard dans l’achèvement des travaux de construction et de réhabilitation des sites sportifs et de logement des athlètes et artistes, mécontentements des fédérations sportives congolaises dépourvues de moyens de préparation des compétiteurs, déficit communicationnel sur les contours de ces jeux, etc. Au final, en dépit des couacs signalés ci et là, l’ambiance très festive autour des jeux a permis d’en occulter les mauvaisetés.
Reste à savoir ce qui en restera structurellement en et pour la RDC. En clair, ces jeux auront-ils permis à la RDC de s’engager dans une transformation profonde de ses infrastructures sportives et culturelles ainsi que, surtout, celle des schèmes mentaux de ses citoyens ? Des défis importants sont à relever pour donner plus de sens à la tenue de ces jeux à Kinshasa.
Parachèvement des travaux et homologation des stades
Kinshasa n’a pas de stade homologué par les instances internationales attitrées. La réhabilitation du stadium de Tata Raphael, à poursuivre et parachever, devrait s’inscrire dans le respect des normes internationales. Rien ne l’indique pourtant. Quant au stade des Martyrs, il ne peut encore abriter les compétitions internationales organisées par la structure patentée du football en Afrique. La RDC doit, pour l’intérêt de ses clubs et un radieux avenir de ses jeunes footballeurs, tout mettre en œuvre pour reconquérir sa dignité. Ceci implique une politique nationale en matière de sports et de cultures faisant encore défaut. Cette politique s’impose pour capitaliser au mieux les infrastructures aujourd’hui existantes à faire revêtir du sceau des instances internationales pour les rendre fréquentables.
Changement positive des mentalités
Malgré quelques cas d’incivisme enregistrés, les jeux ont attesté la capacité des Kinois d’affirmer un sens de l’ordre qu’ignore la « kinoiserie ». En témoignent, par exemple, les routes très peu embouteillées que d’ordinaire sur les artères dédiées au passage des athlètes et artistes francophones. Non sans une présence plus persuasive qu’habituellement dissuasive des éléments de la Garde républicaine. Preuve, peut-être, de la nécessité d’appuyer la police de circulation routière par une unité de discipline citoyenne sur les chaussées de la mégalopole de Kinshasa envahies par des chauffards.
Positionnement diplomatique au sein de l’OIF
Par ailleurs, quoique considérée comme le premier pays francophone où se négocierait l’avenir de la puissance de la Francophonie dans un monde dominé de plus en plus par la langue chère à William Shakespeare, la RDC vient de fixer sur elle l’attention, non sans un grain d’admiration, de tous les Etats francophones. Ne serait-ce du fait de l’engouement suscité au-delà des attentes.
Quoiqu’essentiellement ludique, cette activité revêt aussi un caractère diplomatique en vertu duquel la RDC pourrait se repositionner dans les jeux secrets d’alliances à construire pour devenir assez audible dans les sillages francophones. Particulièrement contre l’agression dont elle est victime de la part du Rwanda, manifestement à l’abri de pressions internationales. Loin de la bulle d’excommunication de Madame Louise Mushikiwabo, implicitement déclarée persona non grata à la cérémonie d’ouverture des jeux, la diplomatie congolaise devrait s’employer à capitaliser la dose variante de confiance que la trentaine des pays y ayant participé lui ont exprimée pour renforcer tant soit peu, à des fins multilatérales, sa coopération bilatérale avec tout un chacun.
Du dépassement pour la réussite collective
En outre, la neuvième édition des jeux a astreint aux autorités nationales un remarquable dépassement pour éviter l’opprobre à la République. Le chef de l’Etat s’y est personnellement investi de la manière la plus évidente. Si cette attitude est maintenue en vue de permettre à l’Etat d’engranger des succès dans l’assainissement des finances publiques, le nettoyage des écuries d’Augias dans le secteur de la justice, le suivi méticuleux de la mise en œuvre des politiques publiques, … ceci permettra à la RDC de procéder, au bout de six mois, au mutage narratif du « miracle » – concept aux multiples connotations à la lisière du péjoratif – au « génie congolais » pour évoquer sa transformation.
Renforcement de la transparence électorale
Enfin, la mobilisation autour de la Francophonie ludique, dans un contexte de vacances sans assez de cadres de détente, a permis de remettre en cause l’aversion éprouvée, fin 2022 et début 2023, par nombre des Congolais contre la Francophonie. C’est la même Francophonie dont le parfum colle toujours à la peau la CENI au sujet de l’audit du fichier électoral peinant à rassurer l’opposition politique quant à la transparence du processus électoral. Outre la visite du Pape et la tenue des jeux de la Francophonie, les élections du 23 décembre constitueront le troisième événement majeur de l’an de grâce 2023, ainsi annoncés par le Chef de l’Etat dans son message de Noël 2022.
Au lendemain des scrutins, les preuves de la transparence électorale plaideront au mieux en faveur de la RDC au sein de la Francophonie. Le contraire, à ne pas écarter, pourrait lui faire perdre les gains symboliques du succès des jeux de la Francophonie.
Lembisa Tini (PhD)