Toute la toile en parle. Le contenu du match de la demi-finale de la Coupe d’Afrique des nations (défaite 1-0 de la RDC contre la Côte d’Ivoire) mercredi dernier n’a pas trop fait parler. Le choix tactique de Sébastien Desabre, quelques maladresses des joueurs et décisions arbitrales n’ont pas eu plus d’audience que la colère de certains Congolais de remarquer que la réalisation du match a zappé le public rouge-jaune-bleu dans les gradins tout au long du match. Et pourtant, ce public avait bien des messages sur la situation dramatique dans l’Est de la RDC, encore une fois meurtri par la violence armée, à faire passer.
La cible des compatriotes indignés a été, vite mais à tort, trouvée : Canal +. Quelques compatriotes au faîte de l’information sur les droits de retransmission de la CAN ont beau rappeler que le téle-distributeur français, qui n’a obtenu que le droit de diffusion, n’y était pour rien. Trop tard : les appels au boycott se répandent comme une traînée de poudre.
Après avoir refusé dans un temps, la direction de Canal + RDC a finalement publié un communiqué de mise au point. Rien à faire : les partisans du boycott campent sur leur position. Avouons-le : Faire changer d’avis à certains compatriotes n’est pas si loin d’une mission impossible.
Toutefois, il y a bien du positif à tirer de ce monumental mal entendu : un certain éveil de conscience d’un peuple qui en a visiblement marre du silence coupable de la fameuse et nébuleuse « communauté internationale » qui ne se cache plus dans sa politique de double standard. Une Ukraine présente à une compétition internationale aura eu, sans demander, le feu vert des instances de football international de déployer ses banderoles et calicots contre l’« invasion russe » devant les caméras. Quand des Ukrainiens meurent sous les bombes, sont contraints d’abonner leurs habitations, c’est sans équivoque un crime contre l’humanité. Mais la vie est belle et doit continuer quand il s’agit des Congolais. Et cela dure plus de deux décennies avec, en somme, des millions de victimes. Cette politique « deux poids, deux mesures » ne peut que légitimement choquer des Congolais. Mais ces derniers, dans leurs actions, ne doivent pas se tromper de cible.
Boycotter les intérêts de l’Occident au pays, c’est bien, mais lesquels concrètement ? Ce peuple est-il au courant que les composantes minérales essentielles utilisées dans la fabrication des ordinateurs, smartphones ou iPhones sont puisées aussi dans le sous-sol de l’Est du pays ? Et que ce sont pour la plupart des multinationales qui entretiennent l’insécurité pour s’en procurer à moindre coût ? Voilà, par exemple, ceux qui peuvent être les principales cibles du boycott.
Ce feuilleton démontre qu’il y a bien besoin d’une bonne information sur les vrais enjeux du sempiternel problème dans l’Est du pays. Aux autorités, médias et leaders d’opinion de saisir la balle au bond.
Socrate Nsimba